C’est la guerre, dit-on. Les à-peine-plus-visibles-qu’à-l’ordinaire s’y cognent encore plus durement, les mains rongées de poudre et de sang, les bottes dans la boue et le visage bien trop souvent non masqué. A l’arrière, experts et gradés pourfendent déjà leurs certitudes et savent désormais très bien vous décrire de quoi, forcément, sera fait l’après. Et quand l’après de l’après sera venu, la rhétorique tardive se chargera d’éclairer les raisons de sa mauvaise grâce à se conformer à ce qu’on avait exigé de lui.
Mais de tous les futurs, le plus sûr est celui que l’on crée, maçonné des pierres grossières que l’on empile, bien avant que d’être celui que l’on prédit, fût-ce à grand renfort de modèles élaborés ornés de toutes les apparences de la scientificité.
Le matériau le plus facile à réunir et échanger sur cette planète, le plus stable, le plus constant, le mieux calculable pour bâtir les fondations de l’avenir, c’est tout simplement notre impuissance à le maîtriser : notre commune ignorance et la fraternité solidaire qui, devant toute autre valeur ou conjecture, devrait en découler.
Même à peu près, j’ignore de quoi sera fait l’après, mais je nous souhaite qu’il soit de création et d’humanité reliée.
Le calcul des probabilités n’est pas, comme on paraît le croire, une science merveilleuse qui dispense le savant d’avoir du bon sens.
Henri Poincaré
Je lis dans l’avenir la raison du présent.
Lamartine